Le samedi 5 octobre, nous avons traversé le Péloponnèse avec notre petit bus pour aller à Néméa, plus précisément à son sanctuaire. Similaire aux autres sanctuaires panhelléniques (ce qui veut dire pour tous les Grecs), tels que Delphes ou Olympie, celui de Néméa est célèbre pour ses jeux sportifs, les jeux néméens, organisés à l’époque tous les deux ans en l’honneur du roi des dieux: Zeus. Notre guide nous a tout d’abord mené à travers les vestiaires où se préparaient les sportifs. Ce vestige de bâtiment reconstruit en -330 sous l’ordre de Philippe II de Macédoine, est l’une des seules structures construites avec des voûtes arrondies. Pour pénétrer dans le stade, nous empruntons un tunnel traversant une colline. Sur les parois de nombreuses inscriptions ont été laissées par les athlètes. Nous entrons enfin éblouis par le soleil d’octobre dans le stade. Jadis, celui-ci pouvait accueillir jusqu’à 40 000, mais maintenant, avec la moitié de sa structure ovale enfouie dans la nature, nous sommes les seuls présents. Ce stade était d’ailleurs entouré d’un caniveau équipé de cuvettes de décantation, approvisionnant en eau potable athlètes et spectateurs. Après avoir admiré l’endroit, nous décidons de recréer un compétition sportive. À l’époque déjà les tricheries étaient bien surveillées et pour empêcher les faux départs, un mécanisme astucieux, l’hysplex, conçu de cordes et de poteaux en bois empêchait les coureurs de partir avant le top départ. Ainsi pieds nus sur la terre néméenne nous courons une longueur du stade, puis les vainqueurs sont couronnés de feuilles de laurier. Juste après, nous reprenons quelques minutes de bus pour arriver du site archéologique au sanctuaire de Néméa. Portant des traces plus ou moins récentes de culte, à l’origine cet espace était dédié aux cérémonies religieuses pour honorer Zeus. À l’entrée nous devinons les bâtiments qui servaient probablement de logement pour les juges ou prêtres et pour les pèlerins. Un aqueduc approvisionnait déjà en eau les bains très anciens qui se trouvaient devant le temple. Sous un soleil écrasant nous marchons vers le fond du site où se situe le temple de Zeus. Devant, un large autel était utilisé pour les sacrifices d’animaux. On reconnaît quelques colonnes restées debout, de style corinthiennes et ioniques. Après la visite du sanctuaire de Zeus à Nemea et une petite pause déjeuner au seul restaurant sur notre route (très fréquenté des touristes), nous nous rendons sur le site archéologique de Mycènes (Μυκήνες en grec moderne et Μυκῆναι en grec ancien).





Ce site donne son nom à la civilisation ayant émergé là-bas au XVIIe siècle avant J.-C. Nous y trouvons dès l’entrée le “cercle A”, une tombe gigantesque appelée à “fosse circulaire” en raison de sa forme en cercle. C’est sans doute là que furent enterrées des personnes éminentes de l’époque, en témoignent la complexité architecturale ainsi que la richesse du mobilier funéraire (objets trouvés dans les tombes aux côtés du mort): armes et bijoux d’or et d’argent accompagnaient ces princes dans leur “dernier voyage”, ainsi que des vases et même des masques pour immortaliser les traits du défunt! L’un de ces masques en feuilles d’or, appelé “masque d’Agamemnon” en référence au roi mycénien dont les exploits sont racontés par Homère, est particulièrement célèbre (bien que l’on ne sache pas actuellement si le masque appartenait réellement à ce roi). Tous ces objets, qui sont maintenant à admirer au Musée national d’Athènes mais dont on trouve aussi des copies dans le musée du site, furent découverts en 1878 pendant les fouilles du site archéologique dirigées par le célèbre archéologue allemand Heinrich Schliemann, qui a eu la grande chance de constater que ces chambres funéraires étaient demeurées inviolées depuis tous ces siècles, c’est à dire qu’elles n’avaient subi aucune ouverture ni pillage depuis leur construction! La visite nous mène ensuite plus haut sur la colline, et nous nous retrouvons très vite face à l’imposante Porte des Lions, qui est l’entrée principale pour pénétrer les murs d’enceintes gigantesques de la cité. Cette porte, composée de blocs monolithiques immenses, est construite selon une technique très élaborée appelée du “triangle de décharge”: pour éviter que le poids des pierres ne fasse s’effondrer la porte, il y a au dessus de l’ouverture un espace vide triangulaire de sorte que le poids sur les murs de part et d’autre de la porte! Cette astucieuse solution est ensuite cachée par la grande sculpture des deux lions qui donne son nom à la porte. Car il faut savoir qu’à l’époque, on chassait encore le lion en Europe! Il n’est donc pas étonnant que le majestueux animal ait été choisi pour symboliser la puissance des rois mycéniens. Une fois à l’intérieur des fortifications, nous nous trouvons dans le centre cultuel, c’est à dire la partie réservée aux rites et bâtiments religieux. On y a retrouvés des petites idoles, figurines de terre cuite, ainsi qu’un autel orné de fresques. Saviez-vous que chez les Mycéniens, les femmes sont toujours peintes avec la peau blanche, alors que les hommes sont représentés en rouge et noir? Nous apprenons qu’à côté des activités religieuses, Mycènes a dû être à l’époque un haut lieux de l’industrie de luxe, avec la production de poteries, mais aussi le travail du métal et de l’ivoire… En continuant à monter sur la colline, nous arrivons ensuite au sommet, à l’emplacement du palais. D’ici, la vue est magnifique: on peut surveiller toute la vallée et on devine même la mer un peu plus bas! Pour autant, nous sommes étonnés d’apprendre que le palais n’était à l’époque constitué que de deux pièces, un vestibule puis une salle de trône avec une petite cour destinée à accueillir les invités du roi. C’est bien loin des palais auquel on s’attendait, quand on pense à des demeures somptueuses avec plusieurs centaines de pièces… Après avoir admiré la vue une dernière fois, nous entamons la descente de la colline par l’autre flanc, pour sortir des murs d’enceinte par la seconde porte de la “forteresse” : il s’agit en fait d’une porte dérobée, bien plus petite que l’entrée principale. Elle était sans doute très bien gardée à l’époque, afin de permettre aux éminences de la cité de s’enfuir en cas de guerre. A seulement quelques centaines de mètres, nous nous arrêtons au fameux Trésor d’Atrée, père d’Agamemnon et roi de Mycènes dans la mythologie. Il s’agit en fait de la tombe dite “à tholos” (qui signifie circulaire) la plus grande et la mieux conservée de l’époque, avec sa forme de “ruche” souterraine de plus de 10 mètres de haut au point culminant de la coupole. Pour faire tenir cette édifice, les Mycéniens ont utilisé la technique de l’encorbellement, qui lui confère sa forme arrondie. Là encore, c’est grâce à un habile calcul de poids que la structure s’est maintenue durant tout ces siècles: en effet, si la tombe n’était pas recouverte de terre, le poids des pierres ferait s’effondrer le plafond. Pour y pénétrer, il nous faut emprunter un couloir d’accès majestueux jusqu’à l’entrée, qui est elle aussi surmontée d’un triangle de décharge. D’après les observations des archéologues, cette tombe princière a été plusieurs fois rouverte, ce qui fait dire qu’on y a fait de multiples inhumations, sans doute pour y enterrer plusieurs rois mycéniens avec leur famille. En sortant du Trésor d’Atrée, nous remontons dans notre fidèle minibus et repartons vers Athènes, sous un soleil couchant qui nous en met plein les yeux. Nous nous arrêtons une dernière fois au fameux canal de Corinthe, creusé au XIXe siècle. Ce profond gouffre est en réalité un canal de plus de huit mètres de profondeur reliant le Golfe de Corinthe à la Mer Ionienne. Pour prendre des photos, nous nous sommes aventurés sur la fine passerelle de métal, tremblant lors de passages de voitures… Une expérience impressionnante qui nous a permis de clore cette longue et passionnante journée en beauté avant de rentrer à Athènes.






